“Salome Jicia, incarne de nouveau Norma (après Cologne et Hambourg en 23) après voir chanté Adalgisa en septembre dernier à Marseille. Disciple de Renata Scotto et d’Alberto Zedda, la soprano géorgienne traduit à merveille la complexité et l’évolution de Norma. On sait l’exigence exceptionnelle du rôle qui, outre les qualités vocales et dramatiques, appelle une endurance assurée pour aborder le finale. La voix est chaude, qui trouve la lumière pulpeuse des aigus, qu’ils soient amples et brillants ou de délicats piani, ronde sur tout le registre, assortie d’une diction exemplaire. On oublie la technique, superlative, tant les traits et vocalises expressives semblent couler de source. C’est une authentique tragédienne, qui a le sens du récit et le charme attendus. La présence, magnétique, fascine et touche, une véritable incarnation. Evidemment chacun attend Casta diva. La douceur caressante, mélancolique de l’orchestre introduit idéalement le chant, et il est évident que chacun l’écoute avec sa référence (qui n’est pas forcément Callas). Mais celles-ci sont vite oubliées tant la liberté de la ligne, ses modelés, et l’émotion qu’elles suscitent sont justes. Comment résister à l’intensité, à la générosité, si authentiques ? La cabalette suivante Ah ! bello a me ritorna, n’est pas moins admirable : le bel canto idéal où le chant le plus virtuose, aux ornements et vocalises exemplaires, au souffle infini, sert une incontestable vérité dramatique. La puissance déclamatoire, fréquemment sollicitée, confirme que nous avons là une très grande Norma.”
(Yvan Beuvard - ForumOpera.com)